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  • Non, non.

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    Le petit homme allait toujours précédé de son chien sur la route où j'aimais à me promener seule. Lorsque j'arrivais à sa hauteur, je gardais alors les yeux rivés sur sa main gauche qui enserrait le pommeau de sa belle canne...

     

    Ce jour-là, il n'était pas tard. Il apparut devant mes yeux remplis du plaisir de le rencontrer. Nous avons parlé.

     

    - Comment t'appelles-tu ?

     

    - Armande ?

     

    - C'est joli...

     

    - Et toi ?

     

    - Pierre.

     

    - On ne peut pas dire que ce soit joli...

     

    - Tu peux m'appeler comme tu voudras !

     

    - Alors, Pierre !

     

    - Tu marches longtemps comme ça ?

     

    - Tu veux dire : depuis longtemps ?

     

    - Non, non.

     

    - Alors, qu'est-ce que tu veux savoir ?

     

    - Si tu sais où tu vas...

     

    - Oui, bien sûr, je vais sous le soleil de midi rendre visite à ma tante qui m'attend.

     

    - Et s'il t'arrivait quelque chose ?

     

    - Quoi ?

     

    - Je ne sais pas, moi, par exemple, si tu tombais à genoux...

     

     

     

     

    Catégories : Rebecca Huppe
  • Ne fais pas ça, Pierre !

     

     

    - Je ne remonterai jamais plus sur scène...

     

    - Ne fais pas ça, Pierre !

     

    - Et pourquoi pas ? Je n'en ai plus envie, tout m'ennuie, ce réverbère artificiel, posé là, au milieu, présent comme l'arbre au zoo... Non ! Je n'en peux plus, je n'en veux plus !

     

    - Calme-toi...

     

    - Il me regarde, je le salue, je m'apprête à lui pisser dessus quand, "pintch", on me rétribue de cette géniale attention par un coup de pied !

     

    - Et alors...

     

    - Et alors ? Tu ne comprends pas ? Je n'ai plus besoin de me regarder dans la glace, je suis ce chien de Chrétien, cet animal en cage, ce petit oiseau noir...

     

    - C'est merveilleux !

     

    - Merveilleux. Tu parles comme une femme couverte de bijoux.

     

    - Pardon. Moque-toi de moi...

     

    - Mais non... tu sais bien que je n'aime pas ça. Tout ça ralentit ma marche, tu n'entends pas ?  Tu es comme moi, comme moi je suis toi, tu es verte, je suis bleue, tu es l'eau et la vase ! Je suis l'eau du fleuve.

     

    - Tu vois bien que tu y es arrivé...

     

    - Mais à quoi ?

     

    - A jouer, devant moi, pour moi, avec moi, en moi, derrière moi...

     

    - Juliette, c'est à ton tour de te moquer ?

     

    - Quelle question ! Je t'aime bien trop pour ça.

     

    - Alors, pourquoi m'ennuyer avec toutes ces sornettes, cette représentation, cette hallucinante histoire d'amour ou de fesse. Pourquoi ? Veux-tu me mettre en colère... Je te menace, si tu ne te tais point.

     

    - Menace ! Et c'est à moi de monter en couleur ! Mon chapeau s'envole !

     

    - Rattrappe-le ! Allons, cours, lève les bras au ciel, baisse les mains, plus vite, plus bas, ramasse...

     

    - Ouf ! Comme ça c'est beaucoup mieux. Je le tiens fort, il ne s'en ira plus.

     

    - La place d'un chapeau est sur une tête, Madame...

     

    - Et celle d'un comédien ?

     

    - Dans la vie, Madame.

     

    - Non. Car la vie est noire comme un carré de chocolat.

     

    - Comment ?

     

    - Elle est noire, toute noire, eau noire, de l'encre noire...

     

    - Et le corbeau est blanc ?

     

    - Exactement.

     

     

     

     

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  • Cette poésie

     

    Les automobiles passaient pavoisant sous des yeux impassibles, les miens, et les eaux indicibles de mes rumeurs passées comme des nuages en fumée, tout cela s'en allait : cible, pas cible, sensible et passible de riens...

    Les sifflements, concaves, de leurs tambours remplissaient mes oreilles d'un liquide froid comme de la mort, présentée comme la maîtresse d'un autre, brune aux traits marqués, mais belle et désirable.

    Cette poésie qui effleurait à mes lèvres engourdies, rappelant l'écume des vagues, la bave d'un chien enragé, que fallait-il en faire ? Un enfer facile à déchiffrer, à dénombrer, à nommer. Cet enfer pour moi avait un nom.

    Antoine garçon enchantait mes nuits, quand il les fréquentait de ses orages pleins de grosse pluie : il faisait ruisseler mes pleurs d'un sage ennui. La mort alors était loin, et l'amour perdu en mer. J'étais libre d'explorer les étoiles lointaines, libre de rester, loin de lui, avec toi qui me perdais.

     

     

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